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Ces notes rendent compte du contenu du livre ; elles doivent encourager le lecteur à consulter le livre lui-même !

Les ingénieurs sont au contact direct des techniques et de leur mise en oeuvre

Ils en voient les possibilités et aussi les limites pratiques.

C'est pourquoi la lecture de ce live est en quelque sorte rafraîchissante.

On pourra juger aussi, d'un autre point de vue, qu'elle est inquiétante car on ne sait pas encore stocker l'électricité ni stocker le CO2.

Sur quelques points, pourtant, on peut ne pas être d'accord, comme je l'indique en commentaires.


Henri Prévot
le 3 février 2017

                                                                                        

Notes de lecture et commentaires

Transitions énergétiques – un éclairage pour le débat

Les ingénieurs ParisTech – Alumni 2016

 
Le livre est formé de 23 textes rédigés par des ingénieurs qui abordent les divers aspects techniques de la production et de la consommation d’énergie et quelques aspects de politique dans le domaine énergétique, en France et à l’étranger.

Il est particulièrement précieux dans ses aspects techniques, qui sont rarement abordés sérieusement dans les écrits traitant de politique énergétique.

 

Partie I : la maison, habiter, consommer
Manger autrement demain ? /  Bâtiments à énergie positive : de l'utopie à la réalité  /  Solutions d'innovations : quand le bâtiment innove / La transition numérique au service de la transformation énergétique dans le domaine de la construction
Partie II  : le quartier  la ville
La qualité de l'air et les transitions énergétiques / Livraisons et autres petits déplacements : l'enjeu du dernier kilomètre / Circuler dans la ville / Vers une mobilité décarbonée et autonome / Les écoquartiers sont-ils le futur de la ville ?
Partie III : la campagne la nature
Du côté de l'agriculture, quels problèmes quelles solutions ? / Biomasse et transition énergétique / Les agrocarburants ou le temps du réalisme / Captage, transport et stockage du CO2, où en est-on ?
Partie IV :  le pays, l'économie nationale
L'énergie, une politique essentielle pour notre avenir / Coûts et prix de l'énergie / Le stockage d'énergie en appui aux énergies renouvelables / Comment calculer l'impact environnemental des énergies renouvelables ? / Quelles perspectives pour la fiscalité carbone ?
Partie V : l'Europe, la planète
Energie et climat, que savons-nous ? / La politique allemande de l'énergie dans le contexte européen / Propositions pour une Europe électrique efficace et dynamique / Les pétroles non conventionnels américain dans un contexte de prix dégradés / L'accord de Paris : une perspective historique.





I- La maison : habiter, consommer

« Est-ce à dire que nous devrons vivre à 17°C ? Pas du tout ! »

Manger autrement demain ? – Marion Guillou : ancienne présidente de l’INRA

Un accès à 3000 kcal/jour/personne dont 500 d’origine animale est en moyenne suffisant et nécessite une production agricole bien moindre que les régimes moyens actuels dans l’OCDE : 4000 dont 1200 d’origine animale. Deux milliards de personnes sont suralimentées.

En Europe et Amérique du Nord, le gaspillage des denrées alimentaires est de 200 à 300 kg par personne et par an ; en France, selon l’ADEME, à domicile, 20 kg/p/an.

Encourager les modes de production durables. Modifier le régime alimentaire : la viande des ruminants a un impact carbone, pour 100 kg, deux à trois fois plus important que celui des poissons, du porc, de la volaille ou des œufs. Les consommateurs occidentaux se partagent en deux groupes distincts : soit ils sont de plus en plus impliqués sur les questions environnementales, soit ils deviennent hostiles au sujet. Même les premiers ne seraient pas prêts à payer davantage pour ces produits.

Commentaires : on aurait aimé avoir des informations à l’échelle mondiale

Bâtiments à énergie positive : de l’utopie à la réalité - Pascal Gontier, enseignant en architecture 

De quelle consommation d’énergie parle-t-on ? Y compris l’énergie grise, celle qui est consommée pour construire le bâtiment et qui, dans un bâtiment à très basse consommation peut représenter tout autant que l’énergie consommée par les habitants ? Y compris l’électricité spécifique ? Par ailleurs, le mode de calcul de consommation d’énergie est ajusté pour que l’on parvienne à un « bâtiment à énergie positive » même lorsque la consommation est supérieure à la production.

Contrairement à une idée répandue, le bâtiment « passif » n’est pas forcément un bâtiment excessivement compact et ses fenêtres peuvent être généreuses, même en façade Nord. En revanche la réduction drastique des ponts thermiques et nécessaire. On peut dire que, pour les bâtiments neufs, la question du chauffage appartiendra au passé.

Une question négligée : la ventilation. Aujourd’hui il existe des techniques efficaces mais difficiles à mettre en œuvre. Il y a des progrès à faire.

Quels que soient les postes de consommation qui sont pris en compte dans la définition du bâtiment à énergie positive, il semble que sa généralisation à l’ensemble du cadre bâti relève, dans un avenir proche, du vœu pieux. La notion d’énergie positive ne peut se concevoir qu’un niveau d’une ville.

Commentaires : cet article contredit des idées répandues (le bâtiment compact par exemple), attire l’attention sur la ventilation ; il ne donne malheureusement aucune information sur les coûts.

Solutions d’isolation : quand le bâtiment innove - François Michel, directeur général d’Ecophon

Une dynamique d’innovation : on observe une rupture profonde par rapport à la tendance à la baisse de productivité et au faible rythme d’innovation constaté dans ce secteur depuis plus d’un quart de siècle. Par exemple, la modélisation des données du bâtiment permet d’en optimiser la conception, la production et la maintenance. Les clients finaux deviennent plus exigeants.

La performance énergétique : l’efficacité de la laine de verre a augmenté du 20% en dix ans. Il y aura aussi des superisolants sous vide. Des automates commandent et contrôlent les systèmes actifs. La transparence des verres des vitres peut être pilotée selon les besoins. Les matériaux à changement de phase pourront diminuer les besoins d’énergie pour la climatisation.

Cela pourrait bénéficier aux bâtiments existants. Aujourd’hui, pour le chauffage, l’eau chaude, la cuisine, l’éclairage, la ventilation et la climatisation, la consommation moyenne d’énergie primaire est de 247 kWh/(m2.an). Par convention, pour 1 kWh d’énergie finale, il faut 2,58 kWh d’énergie primaire dans le cas de l’électricité, 1 kWh dans le cas du gaz, du fioul, des réseaux de chaleur du bois et autres. 45 % du parc se situe dans les classes énergétiques les plus basses E, F et G. C’est vrai quelle que soit la densité de l’habitat. La rénovation thermique d’un bâtiment existant conduisant au niveau de la RT2005 permet de diviser sa consommation par 3. Un exemple concret : une maison individuelle des années 60 à Nancy, en classe énergétique F ou moins, chauffée au fioul avec une chaudière récente, dépense 3000 €/an – supposons que ce soit 3 m3 de fioul. Comme première étape, isolation des combles, isolation par l’extérieur, double vitrage et VMC coûteront une dizaine de milliers d’euros. Sa consommation est alors ramenée à la classe C, et la facture de fioul est réduite de moitié.

Commentaires : un rapport investissement/économies annuelles de 7 ans : on est impressionné par cet exemple concret ! Cependant l’ensemble des travaux coûte probablement beaucoup plus que 10 000 euros ; dans d’autres régions que la Lorraine, la consommation n’est pas de 3 m3 par an ; et le prix du fioul n’est pas toujours de 1 000 €/m3. Voici un autre jeu d’hypothèses : un pavillon en région parisienne consomme 2 m3 de fioul par an car la température est de 18°C et l’isolation du toit est récente, les travaux coûtent 30 000 euros, le fioul est à 700 €/m3 ; l’économie est de 700 €/an. Le rapport investissement/économies annuelles est de 40 ans.

Construction : la transition numérique au service de la transformation énergétique - Philippe Robart : directeur ingénierie et innovation Vinci

De la flexibilité à la réversibilité du bâtiment : Démolir pour reconstruire in situ est très pénalisant en émissions de CO2. Il s’agit donc de construire des ouvrages flexibles (à nature d’usage constante), voire réversibles (avec changement d’usage). Pour cela, un système poteaux-dalles sans retombée de poutre ; pas de voiles béton de partitionnement des logements ; des façades non porteuses, pour pouvoir en changer, celles-ci pouvant être à ossature bois. Le béton procure une bonne inertie thermique. Sur les vitres et les façades, des filtres PV.

Pour la conception, le BIM est un outil de modélisation 3D ; il permet de rechercher l’optimisation de la conception et de la construction et de faire communiquer les acteurs. Vinci utilise le BIM. L’automatisation de la construction peut s’appuyer sur quatre familles de techniques : la préfabrication, la robotique, qui se substitue à l’acte manuel, la cobotique qui facilite l’acte manuel, l’impression 3D. L’impression 3D du béton n’est pas encore au point. Elle est peu à l’aise pour produire de la masse mais elle est très performante pour les structures réticulaires. D’où l’idée de remplacer les poteaux par de telles structures, économes en matière ; les planchers seraient préfabriqués et formés d’un matériau mixte béton-bois.

Commentaire : quelle diminution d’émissions « grises » peut-on espérer de ces nouvelles techniques (matériau béton-bois et structures réticulaires), pour un pavillon ou pour un immeuble ?




II - Le quartier, la ville

La qualité de l’air et les transitions énergétiques - Jean-Luc Legoupil, ancien V-Pt de Clecim

Le CO2 en dessous de 0,5% n’est pas toxique ; l’évacuation est requise à 4 %, valeur qui double le rythme respiratoire. Dans les stations de métro, la teneur va de 400 à 1000 ppm (1 pour mille).

Les poussières et particules fines PM10 (moins de 10 microns) dont PM2,5 (moins de 2,5 microns) proviennent dans l’ordre du chauffage, de l’industrie, des épandages agricoles et des anciens véhicules diesel antérieurs aux normes Euro 5. Elles peuvent voyager sur des milliers de kilomètres. En ville elles viennent de la circulation : fumées, usure des freins, des pneus et mise en suspension des poussières déposées sur le sol. Dans le métro, l’usure des freins et des frotteurs électriques.

Les oxydes d’azote, l’ammoniac et l’ozone viennent de la combustion et des épandages agricoles. L’ozone de surface, formé directement ou par les oxydes d’azote et l’ammoniac, est un puissant irritant des voies respiratoires.

Paradoxalement, la contamination des polluants dans l’air diminue depuis trente ans alors que les maladies cardiovasculaires et les cancers augmentent. Aux niveaux d’exposition que l’on connaît, pour apprécier les effets sanitaires, il faut des études épidémiologiques lourdes. Une étude publiée en 2013 dans le Lancet disait elle-même la fragilité de ses conclusions tellement nombreux sont les facteurs en cause et tellement est grande la dispersion des résultats. La bonchiolite du nourrisson augmente alors que la pollution diminue.

Près des trois quarts des flux de déplacement des Franciliens sont réalisés de banlieue à banlieue.

Dans le futur, vélos souvent électriques, autolib, Les véhicules diesel consomment 15 à 20% de moins que les véhicules à essence et les normes Euro5 et 6 diminuent considérablement la pollution : le Japon, où le diesel était interdit, en autorise désormais l’usage.

Que faire ? Pour la voiture le cadre réglementaire est déjà très exigeant. Pour le chauffage, diminuer la consommation, utiliser une chaudière à basse température ; après la pluie (qui nettoie l’atmosphère) aérer copieusement les locaux d’habitation, mettre un masque pour ne pas contaminer ses voisins, privilégier l’essorage sur le séchage, adopter une conduite de véhicule calme, utiliser le covoiturage.

Commentaires : l’auteur remet sérieusement en question l’utilité de la pratique de la circulation alternée ; il montre que les nouveaux véhicules diesel sont très peu polluants ; les sources de particules fines sont ailleurs, y compris dans le métro et RER. Pour ce qui est du comportement individuel, les recommandations sont de bon sens mais leur effet n’est pas chiffré.


Livraisons et autres déplacements : l’enjeu du dernier kilomètre  Patrick Souhait, ancien DG de Muses

La société connaît de profonds changements dont nous ne sommes pas toujours conscients : les malades restent chez eux ; 11 millions de personnes ont plus de 65 ans ; en centre ville, nous sommes de moins en moins nombreux à posséder une automobile ; nous attachons plus de prix au temps gagné. A quoi s’ajoutent la « mondialisation », la communication par Internet et la facilité de transport. Tout cela multiplie les petits déplacements depuis l’hôpital ou depuis le dépôt de marchandises jusque au domicile du consommateur.

A chaque livraison, son véhicule. La commande peut se faire par Internet, la livraison se fera encore longtemps par transport terrestre (avant les drones et l’impression 3D) ; dans Paris, la livraison consomme 25 % de la consommation totale d’énergie de transport y/c des personnes ; presque à 100% par des véhicules diesel.

Les évolutions : véhicules au gaz ou électriques ; des bornes de recharge  électrique au dépôt et en centre ville ; des stations de gaz en périphérie. La mutualisation : sur le petits trajets, utiliser un même transporteur pour plusieurs clients et plusieurs fournisseurs. Redonner à la logistique du foncier en centre ville. Etaler les horaires de livraison.


Circuler dans la ville
 : Frédéric Baverez, directeur exécutif France de Keolis:

Une voiture particulière en ville est réputée émettre en moyenne 206 gCO2 par passager-kilomètre ; un autobus 129 gCO2 et le train quasiment rien. Quant à l’emprise foncière, pour transporter 50 000 personnes par heure et par direction, l’emprise routière est de 175 m de large pour la voiture, 35 mètres pour le bus, 9 mètres pour la voie ferrée.

A l’avenir on verra surtout le développement des bus à haut niveau de service et des trams-trains. Les services au client seront multipliés (information, notamment par Internet, billettique intermodale, etc.) ; le temps de transport pourra être davantage valorisé par d’autres activités ; et l’usage de la voiture deviendra de plus en plus coûteux. Mais la part du coût des transports collectifs acquittée par le voyageur augmentera : elle est aujourd’hui pour l’ensemble de la France de 32%.

L’essor des deux roues (pistes cyclables, abris sécurisés, systèmes de vélos libre-service). Transport en voitures partagées.

La technologie au secours de l’environnement : forte diminution de la consommation des véhicules ; épuration des fumées, emplacement du carburant pétrolier par du gaz, développement de l’électricité (outre le train, le métro et les tramways, véhicules hybrides rechargeables, véhicules hybrides, y compris les autobus urbains électriques se rechargeant au dépôt ou, par « biberonnage » au terminus à chaque passage).

 
Vers une mobilité décarbonée et autonome  - Jacques Aschenbroisch, PDG de Valeo

Les consommateurs recherchent des véhicules moins consommateurs d’énergie. La demande dans les pays en développement, notamment en Asie explose : la production en Chine a doublé de 2007 à 2015.

L’électrification des véhicules restera limitée aux pays industrialisés et en Chine. En effet, c’est encore cher. Pour un véhicule électrique, il faut une subvention de 10 000 € par véhicule : pour 10% du parc mondial annuel, soit 8 millions de véhicules, cela ferait 80 G€ par an. D’ici 2025, le véhicule purement électrique sera très minoritaire. Mais on verra des hybridations plus ou moins prononcées. D’abord le « stop-start » permet d’économiser 5 à 15% d’énergie. Les systèmes auxiliaires (chauffage, éclairage, etc.) seront plus efficaces. S’ajouteront des aides à la conduite, des systèmes de conduite autonome. De plus en plus la voiture sera connectée ce qui conduira à de nouveaux services et introduira de nouveaux acteurs : prestataires de services, acteurs de la bigdata. Tous ces acteurs devront coopérer et la réglementation devra évoluer.

Encore faut-il que tous ces bouleversements annoncés soient acceptés ou désirés par le consommateur.


Les écoquartiers sont-ils le futur de la ville ?
Isabelle Foucrier, journaliste pour Paris-Tech review:

En Europe, les villes sont relativement denses ; l’étalement urbain est limité. Aux Etats-Unis la faible densité de population (34 hab/km2) entraîne une dévoration de l’espace. Rappel : les Américains consomment en moyenne 12 000 kWh par personne et par an, contre 6 000 en Europe occidentale et 1 000 en Inde ou en Chine. En Europe, sur le papier l’éco-quartier serait une réponse à tous les défis de la ville du futur… en même temps ! Depuis plus de quinze ans on cite inlassablement les mêmes lieux exemplaires : Vauban à Fribourg… et surtout le pionnier des pionniers : Bedzed en Grande-Bretagne. Créé en 2002, neutre en carbone ; 85 logements, 2500 m2 de bureaux, transports doux etc. et mixité sociale et gestion participative. Un écoquartier doit comporter des bâtiments à énergie positive. Penser à l’enjeu économique. En finir avec le zonage ; veiller à la mixité sociale (à cet égard Malmö est un échec). La ZAC de Bonne à Grenoble, le quartier des Docks à St Ouen sont à cet égard de bons exemples. Mais l’écoquartier ne sera un succès que s’il fait partie intégrante de la ville. Autres difficultés : l’attractivité des écoquartiers fait monter les prix et exclut une partie de la population ; la recherche de l’optimum technique oblige, paradoxalement, à « apprendre aux habitants à habiter », ce qui est à l’opposé de la démarche participative : les habitants ne sont pas consultés, ils sont formés. En réalité ce que l’on fait passer pour des écoquartiers, le plus souvent, n’est que le respect des réglementations existantes. Le principal mérite de l’éco-quartier est de réhabiliter la notion de quartier.





III- La campagne, la nature

Du côté de l’agriculture, quels problèmes, quelles solutions ? -Collectif du projet Grignon, énergie positive 

L’énergie directement consommée par une exploitation représente 9% de ses charges variables. L’énergie totale, y compris indirecte, 12 à 20 %. Le Plan pour la compétitivité et l’adaptation des exploitations agricoles a été mis en place pour les années 2014-2020 : il a un volet énergétique. Pour diminuer la consommation de fioul, adopter des pratiques culturales simplifiées : le non-labour (économie de fioul de 5 à 10% à rendement équivalent selon l’ADEME), le recours au pâturage, des tests de tracteurs sur banc d’essai pour trouver des modes de conduite économes, l’utilisation d’huile végétale pure, des systèmes de récupération de chaleur en salle de traite, la biométhanisation (la simple couverture de la fosse à lisier par un bâche étanche est testée à Grignon), un pilotage précis de la fertilisation, l’utilisation d’effluents organiques, la culture de légumineuses (pour enrichir en azote) ; pour l’alimentation du bétail, cultiver des plantes qui nécessitent peu d’énergie ou d’intrants : légumineuses comme la luzerne ou aliments fabriqués à l’extérieur avec peu d’énergie (coproduits industriels ou autres), diminuer la taille du troupeau, chaque animal pouvant alors produire plus de viande ; rechercher des synergies entre exploitations agricoles : partage d’une même machine, échange de luzerne contre des lisiers. Cela peut créer des contraintes nouvelles, par exemple la culture de la luzerne.

Commentaire : p.98 on lit « du fait de l’épuisement des ressources énergétiques non renouvelables » : au contraire, si le monde réussit une transition énergétique qui limite les émissions de CO2 de façon à écarter le risque de conséquences désastreusesce qui est une erreur, il laissra sous le sol une bonne partie des ressources : n ne peut donc pas parler "d'épuisement des essources".


Biomasse et transition énergétique - Paul Mathis et Hervé Bichat, ingénieurs agronomes:

Le rôle de la biomasse pour diminuer la consommation d’énergie fossile fait l’objet de débats passionnés : il faut se nourrir avant de rouler ! Les usages des productions agricoles et forestières : tout d’abord l’alimentation ; le bois comme matériau de construction. La biomasse fournit des fibres : textile, papier, panneaux agglomérés ; dans la chimie, des molécules ; et la production d’énergie.

Pour l’énergie, trois sources : le bois, les cultures, les déchets (déchets urbains solides ou liquides, déjections d’animaux, déchets des industries agroalimentaires). Les usages : la chaleur pour se chauffer, pour l’industrie ou, en cogénération, pour faire de l’électricité, les carburants et le biométhane, l’électricité (la production d’électricité seule est en France, d’un intérêt très limité).

Le bilan de la biomasse en termes d’effet de serre : 1 tep émet 3,3 tCO2 avec du pétrole, 4,2 tCO2 avec du bois, mais ce CO2 est progressivement « repris » par la croissance des arbres. Il faut aussi tenir compte des autres émissions de GES, comme les NOx  dans les processus de production. 

Un meilleur usage des sols : d’une région à l’autre, les situations sont très différentes, des zones très pauvres à la Suède ou au Brésil. (avec sa forêt, ses espaces et sa canne à sucre, une plante exceptionnelle). Au plan mondial, la biomasse pourrait maintenir son pourcentage dans le bouquet énergétique dans l’hypothèse d’un doublement de la consommation totale d’énergie d’ici 2050.

En France : en 2011, la consommation d’énergie finale fut de 168 Mtep. En 2050, si la consommation finale est réduite de 100 Mtep, ce qui est très ambitieux, et si l’énergie fossile est divisée par six, les énergies non carbonées devraient représenter 81 Mtep. Or aujourd’hui la biomasse fournit 13 Mtep pour chaleur et biocarburant. Dans les forêts, une possibilité de 31 Mm3/an n’est pas exploitée ; utiliser davantage de déchets, remplacer une partie des taillis existants par des taillis à courte révolution. La consommation de bois pour le chauffage pourrait passer de 10 Mtep à 18 Mtep. Quant au biocarburant, si l’on y consacre 4 Mha, avec une production nette d’énergie de 2 tep/ha/an, cela ferait 8 Mtep. Les déchets pourraient produire 3 Mtep. Soit, en tout, 11 Mtep. Néanmoins, on est de plus en plus conscient de ce que peuvent apporter d’autres usages des déchets. Au total, la disponibilité de la biomasse pour l’énergie pourrait être de 30 Mtep, au lieu de 14 aujourd’hui. C’est significatif mais modeste.

Commentaires : il est écrit : « une politique de valorisation énergétique va requérir une forte action (remembrement, aide à l’investissement à très long terme). Aujourd’hui, le verrou est souvent l’absence d’outils financiers ; je dirais donc plutôt : création d’un moyen de financement adapté au rythme de la forêt. Il se pourrait que ce nouvel outil rende possible une incitation à une gestion regroupée, ce qui éviterait de passer par le remembrement. On peut voir plus de développement ici.

Au sujet du biocarburant, la production par thermochimie avec apport d’hydrogène utilisera beaucoup mieux la biomasse. On n’aurait pas besoin de 4 Mha mais de 2,5 ou 3 Mha.


Les agrocarburants ou le temps du réalisme
- Jacques de Naurois, ancien cadre diriegeant de Total

Jusqu’en 2007, l’opinion publique a vu dans les biocarburants la solution parfaite aux problèmes du transport. Puis, avec l’envolée des cours des matières premières agricoles, le biocarburant a été accusé d’affamer le tiers- monde. Le biocarburant a l’avantage d’être liquide et très dense en énergie. Et la production émet peu de gaz à effet de serre : le taux de réduction est 45% pour les biogazoles de colza, 60% pour l’éthanol de betterave, 70% pour l’éthanol de canne à sucre au Brésil. Mais le coût est très élevé. L’éthanol sur canne à sucre coûte 400 €/tep ; sur blé maïs ou betterave en Europe ou aux Etats-Unis, 700 à 800 €/tep ; les esters de colza en Europe, vers 1100 €/tep. C’est l’utilisateur qui supporte la différence de coût avec le carburant pétrolier, sans toujours en avoir conscience. L’acceptabilité repose aussi sur d’autres facteurs : arbitrage entre les utilisations de la biomasse, utilisation des sols et de l’eau, capacités de travail, préservation de la biodiversité. La filière devrait être plus transparente quant aux coûts et aux impacts.

Au Brésil, la canne à sucre occupe 7 Mha, soit 10 % de la surface cultivée mais seulement 2 % des erres arables.

Dans la biomasse on trouve des molécules qui stockent de l’énergie (sucre, amidons, huiles naturelles) et d’autres qui maintiennent la structure. Les premières servent à l’alimentation. Une voie de recherche tend à produire à partir de ces molécules des carburants « avancés » plus lourds que l’éthanol, des alcools lourds ou des huiles issus directement des sucres fermentescibles. Pour la deuxième génération, deux voies sont explorées pour utiliser les molécules « de structure » : la voie thermochimique et la conversion biologique (des projets pilote commencent à voir le jour). La production à partir d’algues est beaucoup trop coûteuse. Il n’y aura rien avant 2020.

Dans le monde, on peut raisonnablement penser que la consommation de biocarburant, qui est aujourd’hui de 1 Mbl/jour, sera de 2,5 Mbl/ en 2020, 75 % en éthanol et 25 % en biodiesel ; la consommation de carburant, qui était en 2008 de 34 Mbl/j, sera en 2020 de 50 Mbl/jour.


Captage, transport et stockage du CO2 – où en est-on ?
François Giger, président du club Mines-énergie

Dans les années 2000, grands espoirs ; succès technique de la norvégienne  StatOil à Sleipner, en mer du Nord : l’Etat norvégien avait imposé une taxe de l’ordre de 30 à 50 $/tCO2 sur certaines émissions de StatOil ; pour ne pas avoir à la payer, Statoil a injecté depuis 1996 un million de tonnes de CO2 par an dans un aquifère salin à proximité. En 2005, Tony Blair a annoncé quatre projets industriels. La Commission européenne, avec ses DG R&D, environnement et énergie, a créé un plateforme technologique avec les secteurs industriels concernés et en invitant des ONG « sociétales » qui a élaboré rapidement un plan stratégique de recherche et un plan de développement stratégique de la technologie en Europe et, pour chacune des briques technologiques, un état des lieux et une description des efforts à réaliser : le statut juridique du CO2 (qui ne doit plus être considéré comme un déchet liquide), le transport transfrontalier, l’acceptation par la société (cf. les remontées de CO2 dans le cratère volcanique Nyos), le surcoût,  les difficultés organisationnelles vu la diversité des acteurs et de leurs objectifs : les pétroliers se voient gestionnaires de stocks de CO2, les producteurs à partir de charbon donnent la,priorité au rendement, les gaziers disent que la meilleure façon de réduire les émissions est de remplacer le charbon par du gaz.

Le captage du CO2 : par un procédé expérimenté au Havre,  la perte de rendement de production électrique a été ramenée de 12 points de rendement à 8 points, soit près de 20 % ; la baisse d’émission est de 90%. Le réseau de transport : pas de problème technique ; mais des difficultés d’acceptation et de financement. Le  stockage géologique : les difficultés ont été largement sous-estimées. A Sleipner, la porosité est supérieure à 20%. De multiples études à caractère géologique ont été faites un peu partout en Europe en utilisant les puits creusés par les pétroliers, mais il manque des mesures de porosité des roches et des mesures pour évaluer le facteur dynamique d’injectivité ; de plus lorsqu’un puits a traversé un aquifère, les travaux d’étanchéité n’ont pas prévu que l’aquifère contiendrait du CO2, qui est acide. Une étude faite exprès dans le Nord conclut que, pour absorber les émissions d’une tranche de 1 GW au charbon, il faudrait plusieurs sites de stockage.

Perspectives : pour le captage : l’investissement pour équiper la tranche boundary Dam 3 de 139 MW a été de 6000 $US/MW installé ; à quoi s’ajoute une pénalité énergétique de 40 à 50 MW. Le coût de la tonne de CO2 atteindrait 100 $ canadien/tCO2. La valeur de vente est sans doute de 25 $/tCO2. Dans le projet en cours de centrale au lignite avec gazéification de 582 MW de Kemper County dans le Mississipi, le surcoût dû au captage est de 9500 $/MW. On cherche à améliorer la flexibilité, par exemple en installant en parallèle deux ou trois installations de captage. Il faudrait diviser le coût du captage par 5. L’évaluation des capacités de stockage doit être faite site par site. La situation aux Etats-Unis semble favorable ; les résultats obtenus en Europe sont plutôt décevants ; tout reste à faire en Chine et en Inde. Techniquement, on envisage de pomper l’eau des aquifères pour faire de la place. Il restera ensuite à établir un modèle d’affaires.

L’effort industriel à déployer sur une vingtaine d’années est considérable ; pour le captage la taille cumulée des installations se compare à celle du raffinage, pour le transport à celle du transport du gaz naturel et pour le stockage aux infrastructures d’exploitation des plus grands gisements de pétrole et de gaz.

Commentaires : il est fort utile d’avoir en tête les difficultés que le CSC aura à surmonter. Une remarque : pour le captage, un investissement de 9500 $/MW soit 2000 $/MW /an pour une production de 6000 MWh/an génère un surcoût au MWh inférieur à 1 $/MWh. Une perte de rendement de 20 % génère un surcoût de 12 $/MWh environ. Or F. Geiger dit qu’il faudrait diviser les coûts par 5 ; on s'interroge sur la cohérence de ces données chiffrées. Il y a peut-être eu des erreurs de frappe...




IV Le pays, l’économie nationale

 L’énergie une politique essentielle pour notre avenir - Jean-Pierre Schwartz, ing. civil des mines

On rappelle d’abord les chiffres de production et consommation. Le surcoût global des éoliennes et PV est de 3 milliards d’euros en 2013. Attention aux coûts de la rénovation thermique des bâtiments. On considère généralement que le coût de l’électricité avec CSC devrait être compris entre 60 et 100 €/MWh à comparer à 50 €/MWh sans CSC. Le coût du nucléaire, mesures post Fukushima, sera à moyen terme de 66 €/MWh. Sans les coûts supplémentaires de stockage, d’installations de secours et de réseaux, on estime que l’éolien sur terre coûtera 65  €/MWh, en mer 85 €/MWh (mais les récents appels d’offre donnent un coût très supérieur), pour le solaire 350 €/MWh (cf. Négatep 2011). Sur le nucléaire, le rapport de l’Académie de médecine de 2003 est cité ; il fait cinq recommandations : éviter les ruptures d’approvisionnement, maintenir la filière nucléaire car elle a le plus faible impact sur la santé, étudier l’effet des faibles doses, réduire la pollution due aux transport et aux rejets industriels et domestiques, être attentif aux effets sanitaires du réchauffement climatique. S’ajoutent les nuisances visuelles et sonores de éoliennes, l’occupation de l’espace et des sols.


Commentaires : on lit : « Les décisions du Conseil européen et les directives de la Commission font en effet partie des contraintes encadrant les possibilités de choix de chacun des pays membres ». Selon le traité sur l’Union, les Etats membres sont maîtres de leur mix énergétique ; la seule contrainte européenne est le total des émissions de CO2 outre  des normes techniques sur la pollution.

Sur la rénovation thermique, l’article met justement l’accent sur la nécessité d’études économiques au cas par cas. Les indications sur les coûts de production devraient être actualisées.


Coûts et prix de l’énergie- Jacques Maire, ancien président de Gaz de France

Le pétrole et la gestion des rentes : les nouveaux gisements coûtent de plus en plus cher : les dépenses d’exploration et de production ont été multipliées par cinq de 2000 à 2012 alors que l’indice général des prix a été multiplié par deux. Les coûts vont de moins de 10 $/bl à 100 pour les sables bitumineux. La demande d’électricité est peu élastique aux prix. Les compagnies nationales de pays producteurs représentent 52% de la production et 88% des réserves : l’OPEP : 45% de la production et 75% des réserves. Depuis le premier choc pétrolier, en 1973, la population de l’Arabie saoudite est passée de 7 à 30 millions d’habitants. A 90$/bl, 60% des pays de l’OPEP connaissent un déficit budgétaire. Vue des pays producteurs, la situation actuelle (100 $/bl au moment où le texte a été écrit)) et un bon équilibre. Les pays consommateurs voudraient des prix bas et un impôt, ce qui ne peut que révulser les producteurs.

Le gaz ou le rêve de l’âge d’or : le gaz n’a pas de marché captif, mais il se transporte mal ; il y a trois marchés ; européen, nord-américain et asiatique. Les Etats-Unis exporteront-ils ou conserveront-ils leur gaz ? En Europe les marchés sont régis par des contrats à long terme, nécessaires pour financer les investissements de transport. Le effets réciproques entre les marchés asiatiques et européens pourraient à terme se faire sentir avec le gazoduc entre la Russie et la Chine et des gazoduc entre l’Iran ou le Turkménistan et l’Inde.

Le charbon : l’énergie tranquille : le niveau de production est plus sensible au prix que celui de pétrole ou du gaz car le coût marginal de production est supérieur. Le concurrent du charbon est le gaz, pour la production d’électricité. Il n’y a pas de marché international du charbon mais des transactions importantes entre grands acteurs.

Le nucléaire : le seul compétiteur crédible à grande échelle aux énergies fossiles. Il n’y a pas de rente minière à gérer.

Les énergies nouvelles, domaine du volontarisme : pas de rente minière ; les coûts sont élevés. Ces énergies nouvelles ne sont pas près d’influer sur le prix des autres énergies à qui elles fournissent même une référence élevée.

Au total : les prix de l’énergie ne vont pas diminuer mais des oscillations importantes peuvent toujours se produire. Il n’y aura pas d’énergie miracle qui s’impose face aux autres. Le rôle des Etats est déterminant. La facture dépend aussi du comportement du consommateur.


Commentaires : cette courte note est intéressante ; sans doute ne montre-t-elle pas suffisamment l’intérêt qu’ont les producteurs à bas coût à s’entendre pour diminuer leur production et faire monter les prix ; elle évoque le rôle des Etats-Unis sur le gaz sans dire que bientôt ils auront aussi ce rôle clé sur le pétrole. Par ailleurs, elle a été rédigée avant que l'on puisse perndre en compte le double phénomène récent de baisse des prix du pétrole suivie d’un début de remontée.


Le stockage d’énergie  en appui aux énergies renouvelables  
Jean-Luc Legoupil, ancien V.P. de Clecim :

Les besoins de stockage : il faut tenir compte des rendements de stockage, déstockage : 70% pour des Steps ou des batteries, 28 % si l’on passe par de l’hydrogène ; il est prudent aussi de se donner un marge. Pour répondre à une demande constante de 1 MW, il faut une capacité nominale de 10 MW d’éolienne si le stockage d’électricité se fait avec des Step ou des batteries, 23 MW si le stockage se fait avec de l’hydrogène ; 60% de plus si la production d’électricité est photovoltaïque.

Les Step dans le monde : 100 GW répartis sur 400 sites ; en France, 5 GW ; la puissance va de 330 à 1790 kW, la durée de stockage de 3 à 40 heures. Un nouveau concept : unités de 50 MW à installer le long des côtes. Un tout nouveau concept : le stockage littoral par atoll artificiel fermé, avec une dénivelée de 32 à 40 mètres sous le niveau de la mer.

Les batteries au plomb doivent être remplacées tous les trois ans, au lithium (LiFePO4, beaucoup plus chères), au moins tous les dix ans, pour 2000 cycles profonds. La recherche est très active mais les solutions industriellement exploitables restent à découvrir. Les batteries à flux Redox (flowcells) : leur point faible est la tenue des membres qui séparent les électrolytes.

Le stockage thermique par sels fondus dans une centrale solaire thermodynamique : en Espagne, une installation de 150 MW produit 160 GWh/an ; aux Etats-Unis, 377 MW installés, 2,2 G$, n’a produit que 67% de sa capacité nominale (sans doute 67% de 1500*377 soit 400 GWh, donc un coût d’investissement de 300 M$/an pour 0,4 M de MWh soit 700 €/MWh).

Le stockage par électrolyse d’hydrogène : le rendement est compris entre 25 et 30 %. La recherche reste active. L’hydrogène peut alimenter des piles à combustibles.

Les supercondensateurs : rendement de 90 %, inusables mais de très faible capacité (il leur manque un ou deux ordres de grandeur).

Le stockage mécanique par air-comprimé dans des réservoirs souterrains : rendement de 40%, durée de stockage de quelques heures seulement.

Aucun de ces procédés ne peut remplacer les centrales thermiques « stand by »  à un prix acceptable.

Perspectives du stockage : en fait on ne voit pas ! Les besoins générés par l’intermittence sont en effet colossaux.  Si la moitié de la production française était assurée en éolien, pour cinq jours sans vent en hiver, il faudrait une capacité stand by  de 3360 GWh : 5 milliards de batteries au plomb de grosses voitures actuelles, et les unités de conversion pour se raccorder au réseau : une dépense initiale de 75 000 euros (si le batteries sont au plomb, sinon beaucoup plus) avec un coût d’entretien de 15 000 euros par an pour chacun des 20 millions de foyers français. Pour une capacité égale à 34 fois celle des six principales STEP françaises. Le stockage ne serait possible aujourd’hui qu’avec la fabrication d’un combustible synthétique (hydrogène ou méthane) : mais le rendement énergétique est inférieur à un tiers. Quant aux batteries, leur coût environnemental (épuisement des ressources, toxicité) devrait être réduit de plusieurs fois le facteur 10.


Commentaires : voilà un texte qui ne se paye pas de mots. Quant à la production d’énergie à partir d’électricité « en trop », le rendement énergétique est en effet médiocre, mais cet indicateur n’est pas le plus pertinent : le bon indicateur est le coût par tonne de CO2 évité. Sans éolienne ni solaire, mais avec du nucléaire, l’utilisation d’électricité nucléaire hors période de chauffage pour produire du biocarburant est sans doute pertinente. De plus, le chauffage hybride –fioul ou gaz et électricité est une alternative au stockage ; elle est particulièrement peu coûteuse si l’on sait utiliser les installations de chauffage au fioul ou au gaz existantes.


Comment calculer l’impact environnemental des énergies renouvelables ?-
Isabelle Blanc : Maître de recherche à Mines ParisTech

Il faut penser à l’épuisement des ressources minérales dont ont besoin les EnR : la dépendance des éoliennes au néodyme et au dysprosium (des terres rares) nécessaires à la fabrication des aimants permanents des alternateurs : un déficit de dysprosium s’annonce à partir de 2020. Les technologies photovoltaïques très prometteuses CIGS (cuivre indium, gallium, sélénium) sont confrontées aux mêmes enjeux : le ratio réserves sur production de l’indium est de 20 ans seulement.

L’analyse du cycle de vie s’appuie entre autres sur le temps de retour énergétique, un indicateur pertinent pour les EnR. Il faut faire un calcul spécifique aux pays de fabrication des composants des générateurs d’électricité. Par exemple, pour un panneau PV monocristallin, 1,9 ans s’il est produit en France, 2,34 s’il est produit en Chine. Si l’on tient compte des émissions de CO2, on calcule un « temps de retour climatique ».


Commentaire : comme la principale contrainte est les émissions de CO2, plus prégnante que la disponibilité en énergie primaire, le « temps de retour climatique » est beaucoup plus pertinent que le « temps de retour énergétique » qui, au fond, n'a guère d'intérêt et peut induire en erreur. Par exemple, la production de carburant pétrolier a un temps de retour énergétique quatre fois meilleur que celle d'un biocarburant par thermochimie avec apport d'hydrogène. - mais ce biocarburant est la cause d'émissions de CO2 très inférieures à celles du carburant pétroler.


Quelles perspectives pour la fiscalité carbone ?
- Richard Robert, directeur de ParisTech Review

Par exemple, la Californie prévoit une réduction de ses émissions de 25% en 2020 et de 80% en 2050. Un des enjeux était la création d’emplois « verts ». La campagne pour faire adopter la loi a été financée par des hedge fonds qui voyaient dans  « l’économie verte » l’occasion de fortes plus-values. Une taxe CO2 est une taxe à la Pigou. Certes, mais comment créer une taxe d’un montant suffisant sans créer un nouveau choc pétrolier ?

Un deuxième débat porte sur le choix entre taxe et permis. Autre méthode : les feed-in tariffs, c'est-à-dire une subventions aux énergies peu émettrices.


Commentaires :en réalité, dès qu’une limite d’émission  été fixée, la taxe dont on a besoin pour la respecter est le « coût dual de la contrainte », c'est-à-dire qu’elle doit être juste suffisante pour que les décisions des acteurs économiques soient telles que la limite d’émission soit respectée. Cela n’a rien à voir avec une taxe à la Pigou. Par ailleurs, la théorie ne dit pas par qui cette taxe (à la Pigou ou non) doit être perçue. Si elle est perçue par le producteur, elle peut être nulle au stade de la consommation, ce qui montre que l’on ne peut pas réfléchir sur ces questions sans une vue globale, intégrée, de la taxe et de la rente d’oligopole – celle-ci ayant les mêmes effets qu’une taxe en amont.




V   L’Europe, la planète

Energie et climat : que savons-nous ? Valérie Masson-Delmotte, directrice de recherche au CEA

Les rétroactions sont multiples. Il faut lever une équivoque : l’évaluation des risques climatiques futurs ne repose absolument pas sur une extrapolation à partir de séries passées. Les modèles de climat sont en permanence testés sur leur capacité à représenter les changements passés, par confrontation à tout un ensemble d’informations. Les sciences du climat sont un domaine de recherches académiques très vivant. Les rapports du GIEC indiquent clairement les degrés d’incertitude. Les observations du changement climatique en cours montrent plusieurs tendances significatives : un réchauffement de la surface de 0,85°C depuis 1900, une modification du profil vertical de la température atmosphérique, une augmentation de l’humidité atmosphérique, un réchauffement plus marqué de la surface des continents, une augmentation de la fréquence des vagues de chaleur et de l’intensité des précipitations le plus fortes… Tout cela est cohérent avec les études théoriques.

Pour le futur, selon les scénarios, l’évolution du climat ne se différencie qu’à l’horizon d’une trentaine d’années. Le changement est lié au total des émissions. Pour que la température n’augmente pas de plus de 2°C par rapport au milieu au XIXéme siècle, il ne faudrait pas avoir émis au total plus de 790 GtC –au rythme actuel, d’émission, il nous resterait donc 20 à 30 ans de consommation d’énergie fossile. Quant aux effets, il est très difficile d’anticiper les événements à petite échelle spatiale. Mais les zones littorales seront très affectées par la hausse du niveau des océans. Ce qui est sûr, c’est que l’incertitude est grande ; un exemple pratique : une forte chaleur déforme les rails de chemin de fer.

La politique allemande de l’énergie dans son contexte européen - P. Audigier, Ing. Gal des mines:

Un rappel historique, depuis 1991 : en 1998, un prix garanti aux producteurs d’électricité renouvelable. En 2002, une loi sur la sortie du nucléaire. En 2010, une loi retarde la sortie du nucléaire ; cette loi est très impopulaire. 2011, trois jours après Fukushima, annonce de l’arrêt immédiat de huit réacteurs et de neuf autres d’ici 2022. Eté 2011, vote des lois correspondantes avec des objectifs pour 2050 ; diminution de la consommation d’énergie primaire de 50% par rapport à 2008, 25% pour l’électricité ; part des énergies renouvelables : 60% de l’énergie primaire ; 80% de la production d’électricité. En 2014, loi EEG-2 : part des EnR dans la consommation d’électricité : 40 à 45% en 2025, 55 à 60% en 1935 ; 80 % en 2050. Ce tournant repose sur un double pari : arrivée à maturité de certaines technologies, notamment le CCS et le stockage de l’électricité, et acceptabilité par la population des nouvelles installations (CCS, lignes électriques). Autre condition nécessaire : que les pays voisins n’adoptent pas les mêmes objectifs !

L’Union européenne n’a pas de compétence explicite sur la politique énergétique. Mais le droit de la concurrence échappe aux Etats : la Commission contrôle les aides publique. Une dérogation a été accordée aux EnR au motif que c’est une activité naissante. Cette justification ne paraît plus aujourd’hui valide. Les objectifs de l’Union européenne : en 2009, le « 3 fois 20 », en référence à 1990 à l’horizon 2020 avec répartition entre les Etats de la baisse des émissions, de la baisse de consommation et de la part d’EnR. Le 24 octobre 2014 : accord des Etats membres pour 27 % d’EnR, une augmentation de l’efficacité énergétique de 30%  (par rapport à 1990) sans répartition entre Etats, ce qui est un gros changement ; diminution de 40% des émissions de CO2, avec répartition entre les Etats. Une communication de la Commission donne la priorité et l’avantage aux EnR, non pas à l’électricité nucléaire.

Les effets pervers de l’intermittence : renforcer les réseaux, investir en installations qui ne seront réellement utilisées qu’une fraction du temps, avoir des capacités de production de réserve ou des capacités de stockage, etc. Tout cela aura un coût, difficile à chiffrer.

Le marché de l’électricité est aberrant : en effet les producteurs d’EnR sont sûrs d’avoir des revenus suffisants pour financer leurs investissements (ils ont un prix garanti) même s’ils vendent leur électricité à prix nul. Cela tire les prix de marché vers le bas de sorte que les autres producteurs d’électricité ne peuvent pas financer leurs frais fixes.

En Allemagne : le prix payé par les consommateurs  domestiques allemands, qui incluent les surcoûts générés par les EnR sont très supérieurs aux prix français. Les industriels, eux, bénéficient des prix bas, sans avoir à payer les surcoûts, donc moins cher qu’en France ! Les émissions de CO2 dues à la production d’électricité repartent à la hausse : 308 MtCO2 en 2011 ; 318 en 2013. Comme l’a dit Sigmar Gabriel, ministre de l’environnement et de l’énergie, on ne peut pas sortir à la fois du nucléaire et du charbon. Le coût de réseau en Allemagne est de 74 €/MWh contre 41 en France. En 2014 : 69 GW solaire et 183 GW éolien, soit 38% de la capacité mais 14% de la production. En février 2013, P. Altmaier, alors ministre de l’environnement et de l’énergie, reconnaît une erreur de départ : ne pas avoir fixé un maximum de dépenses. En janvier 2014 son successeur S. Gabriel estime qu’il y a en Europe une très grosse surcapacité de production. Néanmoins, il met en place une réserve stratégique de 6 GW en 2018. Et les subventions à la houille restent conséquentes : plus d’un milliard d’euros de l’Etat et de lander. Les trois grands producteurs historiques ont vu leur capitalisation boursière diminuer de près de 50 % depuis 2010. Ils ont engagé des actions en justice. L’objectif d’émission de CO2 en 2050 (une réduction de 80%) n’a pas fait l’objet d’un examen par le Parlement : pour être sur la trajectoire, il faudrait, d’ici 2030, réduire la production d’électricité à base de charbon de 62% et de 80% à base de lignite


Commentaires :

- La compétence de l’Union v/s compétence des Etats en matière d’énergie : il peut y avoir un débat juridique sur la portée de la compétence de la commission en matière d’aides publiques dans le cas de l’énergie. Les Etats membres sont explicitement compétents pour définir leur approvisionnement en énergie. Selon un principe de portée générale, celui de « l’effet utile », un Etat membre doit disposer des moyens de mettre en œuvre la politique qu’il décide, quitte à s’écarter des règles communautaires dans la mesure seulement où c’est nécessaire. On se bornera à constater que la Commission n’a pas fait obstacle à la décision britannique de consentir à EDF un contrat garantissant en fait un prix de vente ce qui a pu surprendre ; peut-être a-t-elle voulu éviter un recours à la CICJ où elle n’était pas sûre de gagner (cf. arrêt Campus Oil).

- La notion de surcapacité de production est difficile à qualifier et à mesurer ; ce qui importe, c’est de pouvoir répondre à chaque instant à la demande ; le bon outil de mesure est, en probabilité, le nombre d’heures par an où la capacité de production est insuffisante. En France, aujourd’hui, la norme est à 3 h. Cette norme sera-t-elle modifiée pour laisser la place aux intermittents ? Ce serait un autre effet fâcheux, très difficile à chiffrer, des éoliennes et PV.


Sept propositions pour une Europe électrique efficace et dynamique
- Jan Horst Keppler, Dominique Finon et Patrice Geoffron : tous trois professeurs ou hercheurs en économie

Cette note, sur un sujet fort compliqué e largement traité par ailleurs, est relativement longue (19 pages) ; on se borne ici à citer les têtes de paragraphe, qui suffisent à montrer l’ampleur de la tâche..

Il nous paraît possible d’associer coordination publique, régime de marché et équité sociale.

- Tenir compte des situations actuelles, héritage du passé, tout en se donnant pour perspective une intégration par la concurrence

- Mettre en cohérence coûts, prix et tarifs électriques : les EnR devront financer les coûts de raccordement et d’intermittence (équilibrage, stockage…) ; les tarifs doivent permettre une bonne rémunération du capital ;  les prix vont augmenter

- Calculer le coût complet de la transition énergétique – non pas un coût théorique mais le coût réel ; le parc nucléaire existant constitue un patrimoine économique qui ne peut être déclassé sans une réflexion approfondie sur le coût des production qui le remplaceront.

- Délivrer le marché du tropisme court-termiste pour assurer les investissements attribuer aux enchères des contrats à long terme

- Faire émerger un modèle économique pour l’offre de capacités : rémunérer la capacité garantie ; mieux valoriser économiquement la flexibilité des moyens de production

- Consolider les infrastructures de transport et de négoce d’électricité

- Ouvrir les chantiers liés à la demande : consommations maîtrisées, investissements efficaces, précarité éradiquée…

Commentaire : on lit : « grâce à une bonne corrélation entre apport éolien et pointe de demande en extrême pointe ». Est-ce réellement le cas ? Ainsi, même sans surcapacité, l’introduction à grande échelle des EnR diminuerait les pointes de prix… Cela demande aussi que l’on définisse la « surcapacité » - cf. plus haut.


Les pétroles non conventionnels dans un contexte de prix dégradés -
Thierry Salmona, directeur scientifique et technique de Imerys

Le niveau de prix bas du pétrole n’est pas compatible avec l’approvisionnement du monde en pétrole à long terme. Les courbes de déclin des puits non conventionnels (les « pétroles de schiste ») sont plus rapides que celles des puits traditionnels et les coûts de production à court terme sont supérieurs à la plupart de ceux des pétroles traditionnels. Les production vont se stabiliser à court terme puis décliner, ce qui entraînera une hausse de la demande, un dégonflement des stocks, puis conduira à l’équilibre du marché et au raffermissement des prix. En l’absence du rôle régulateur de l’OPEP, les pétroles non conventionnels américains peuvent devenir le facteur d’équilibre du marché.

Depuis le début de l’année 2010, la production de pétrole de schiste aux Etats-Unis a ajouté une production de 5 à 6 Mbl/j (million de baril par jour), portant la production mondiale hors OPEP de 52 (2010) à 57,5 (2015) Mbl/j. Dans le même temps la consommation mondiale de pétrole évoluait de 88 à 92 Mbl/j. Depuis 2014, la consommation a augmenté moins vite que prévu et la production OPEP et non OPEP ne cessait d’augmenter. Les 5 à 6 Mbl/j de production supplémentaire des Etats-Unis ont été consommés sur place, réduisant d’autant les volumes échangés internationalement, qui sont de 56 Mbl/j.

Les coûts de production : en page 237 se trouve un graphique indiquant les quantités produites par niveau de coût de production, un coût incluant les frais de prospection et d’investissement.

Selon ce graphique, 25 Mbl/j sont produits au Moyen Orient à un coût complet compris entre 5 et 25 $/bl. Les non-conventionnels américains ont un coût (entre 50 et 75 $/bl) du même ordre que le pétrole de la Mer du Nord, les pétroles de l’Arctique, l’off shore profond Sud-Américain. Parmi les pétroles exploités, les plus coûteux sont les sables bitumineux canadiens (de 60 à 100 $/bl).

En cas de baisse des prix les pétroles non conventionnels américains deviennent non compétitifs après qu’un quart ou un tiers des ressources de la planète sont devenus non compétitifs. Cela a justifié les investissements massifs dans ce secteur.

Après la baisse des prix en dessous de 50 $/bl, 40% de la production mondiale ne sont pas rentables si l’on considère le coût complet de production. Mais à court terme, tant que les puits produisent, on peut ne considérer que les coûts marginaux. Or, sans investissements, la production non conventionnelle diminue très vite. La production d’un puits passe de 100 la première année à35 la deuxième, 23 la troisième, et 14 la sixième année. On peut ainsi calculer la production en 2015 en fonction du nombre de puits forés en 2014. Comme le nombre de plateformes à l’œuvre aux Etats-Unis est passé de 2000 en septembre 2014 à 700 fin 2015, on pouvait prévoir une baisse de production de 1 Mbl/j en 2015. Le chiffre réel est un peu inférieur. Si le rythme de forage reste inchangé, la baisse en 2016 sera supérieure de 20 % à celle de 2015.

Quelle pourrait être l’évolution des prix du pétrole à court ou moyen terme ? La baisse de l’activité de forage dans le monde se fera sentir sur la production (quelques Mbl/j), la probable hausse du prix du gaz relancera les forages de gaz, qui produiront des condensats ; évidemment l’attitude de l’OPEP, particulièrement celle de l’Arabie saoudite sera déterminante. Les industriels américains peuvent s’adapter. Les plateformes qui ne produisent pas sont mises sous cocon et peuvent redémarrer très vite. La production américaine pourrait être la production tampon ajustant offre et demande ; si tel est le cas, elle devra savoir s’adapter très vite. Elle s’adaptera également pour diminuer ses coûts autour de 50-60 $/bl, ce dont elle est capable : en technique de forages horizontaux, elle n’a que quatre à cinq ans d’expérience ; on pourra diminuer le nombre des « puits secs » ; une vision toujours meilleure des réservoirs ; l’augmentation du nombre d’étages de fracturation ; la meilleure qualité des agents de soutènement, les droppants, et une meilleure utilisation de ceux-ci.


L’accord de Paris, une perspective historique
- Christian de Perthuis et Raphaël Trotignon, Université Paris-Dauphine, chaire Economie du climat

L’article commence par un rappel historique : la Convention Climat de 1992, le protocole de Kyoto.

L’accord de Paris, un beau succès diplomatique… L’accord s’inscrit dans la démarche ascendante (partir des besoins, des possibilités et des politiques des Etats) initiée à Copenhague. Il confirme l’objectif d’une hausse de température, par rapport à l’ère préindusrielle,  de 2 °C (si possible moins) d’ici la fin du siècle, il abandonne toute velléité d’objectifs contraignants mais crée un nouveau cadre d’application de la Convention Climat. Il vise la « neutralité carbone » dans la deuxième partie du siècle, demande à chaque pays de faire part des mesures qu’ils compte prendre, les NDC (Nationally determined contributions). Telles qu’elles sont aujourd’hui, ces NDT conduiraient en 2030 à des émissions de 55 GtCO2 (milliards de tonnes de CO2) alors que l’on ne pourra vraisemblablement pas limiter la hausse de la température à 2°C  si l’on émet en 2030 plus de 40 GtCO2. Il est donc convenu que ces premières mesures soient renforcées et complétées tous les cinq ans. L’accord de Paris confirme l’aide aux pays en développement annoncée à Copenhague, de 100 G€/an pour les dépenses d’adaptation et d’atténuation (c'est-à-dire pour émettre moins de CO2 que si l’on ne s’en préoccupait pas) ; en même temps l’accord exclut  toute compensation financière au titre des « pertes et préjudices » dus au changement climatique.

Une corbeille qui reste à remplir : d’ici 2020, on intégrera les contributions nationales des différents pays. Il est peu probable que les NDT soient d’ici là renforcées ; au contraire, il y a un risque que, du fait de changements politiques, elles soient dégradées. D’ici 2023, de nouvelles NDC devraient être annoncées pour une prochaine réunion importante en 2025. Il n’y aura pas de sanction, seulement l’obligation de déclarer ce que l’on veut faire et la publicité des résultats de ces actions. La principale motivation à consentir des efforts relève donc de la réputation. Cela pourrait être efficace si les acteurs privés, notamment l’industrie elle-même, croient que cette évolution se fera, agissent et investissent en conséquence et font ainsi en sorte que l’évolution se fera.

On peut l’espérer. On peut aussi constater que l’accord sous-estime les règles de fonctionnement de l’économie globalisée où les décisions se prennent en fonction des valeurs indiquées par les prix. Or ces prix n’intègrent que marginalement le coût des dommages. Pour renverser la tendance lourde qui conduit à une augmentation des émissions, il est urgent d’intégrer la valeur du climat dans l’échelle des prix, le prix du carbone.


Commentaires : cet article montre bien les vertus et les limites de l’accord de Paris. Il se termine par un appel à la création d’un impôt égal au « prix du carbone ». Comme je l’ai montré à plusieurs reprises, les consommateurs d’énergie fossile sont sensibles non pas à un impôt mais au prix auquel ils paient leur énergie fossile. C’est donc le prix à la consommation de l’énergie fossile qu’il conviendrait d’élever jusqu’au niveau qui permet de respecter l’objectif d’émissions de CO2. Comme le prix est le résultat des coûts de production et de transport, des rentes d’oligopole, des impôts fixés en amont et des impôts fixés en aval, parmi lesquels un « impôt CO2 », le montant de ce dernier doit dépendre des autres composantes du prix, notamment le montant de la marge d’oligopole, qui est très variable. Pour plus de commentaires sur la façon de déterminer le montant d'un impôt CO2, on peut lire ici.